2000, avenue McGill Collège, bureau 600, Montréal, QC, H3A 3H3
Tél:514 286-9800
Fax:514 286-7827
Message envoyé!
Nous vous contacterons sous peu
Notre équipe attentionnée attend votre appel.
Contactez nous dès maintenant au
514 286-9800
  • Litige commercial, responsabilité civile et assurances
  • Inspection professionnelle et droit professionnel
  • Pratique illégale d'une profession
  • Droit administratif et droit règlementaire
  • Droit disciplinaire, déontologie et responsabilité professionnelle
English

Droit disciplinaire: la responsabilité civile d'un conseil de discipline qui agit de mauvaise foi

Dans une décision rendue en mai 2014, la Cour d’appel réitère que ni les conseils de discipline ni les ordres professionnels ne peuvent être tenus responsables pour des dommages découlant d’une décision disciplinaire non-fondée que s’ils ont fait preuve de mauvaise foi dans l’exécution de leurs fonctions. La notion de la mauvaise foi est flexible et doit être interprétée afin d’inclure l’insouciance, l’incurie et l’imprudence (Bohémier c. Barreau du Québec, 2014 QCCA 961 (CanLII)).

LES FAITS

En septembre 2005, deux plaintes disciplinaires accompagnées d’une requête pour l’émission d’une ordonnance de radiation provisoire ont été déposées par la syndique adjointe du Barreau contre Myriam Bohémier, avocate. Le Comité de discipline a décidé de déférer l’audition sur le fond et de procéder sur la requête en radiation provisoire. En novembre 2005, l'avocate a été radiée jusqu’à la décision du Comité sur les plaintes. Toute demande faite par l'avocate afin de suspendre la radiation pendant l’appel lui a été refusée.

À la suite d’une requête en récusation des membres du Comité de discipline déposée par l'avocate, le Tribunal des professions, le 25 octobre 2006, jugeant que le Comité était partial, a cassé l’ordonnance de radiation provisoire et a ordonné la réinscription de l'avocate au tableau de l’Ordre.

L'avocate croyant qu’elle a fait l’objet d’une radiation illégale pendant une année a institué une action en dommages-intérêts et dommages punitifs contre le Barreau, son directeur général et les membres du Comité de discipline.

La Cour supérieure a qualifié l’immunité dont jouissent les membres du Comité de discipline en vertu de l’article 193 du Code des professions de relative et a affirmé qu’il faut évaluer la bonne ou mauvaise foi des membres du Comité en prenant compte du contexte dans lequel ils étaient placés et les interventions qu’ils ont faites. Le juge de première instance vient finalement à la conclusion que la mauvaise foi des membres du Comité de discipline n’a pas été établie.

Insatisfaite avec la décision rendue par la Cour supérieure, Myriam Bohémier la porte en appel. Tout en reconnaissant que l’immunité des membres du Comité de discipline est relative, elle estime, en revanche, que le fardeau de démontrer « l’intention de nuire ou la malice » est trop élevé. En effet, Myriam Bohémier prétend que ce n’est pas la preuve d’une faute intentionnelle, mais plutôt celle d’une faute lourde, d’incurie, d’insouciance grave ou d’abus de pouvoir qui doit suffire pour conclure à la mauvaise foi des membres du Comité.

LA DÉCISION DE LA COUR D’APPEL

Après avoir tenu compte des arguments invoqués par chacune des parties, la Cour d’appel tire les conclusions suivantes :

1.    Les conseils de discipline et leurs membres ne peuvent être poursuivis en justice en raison d’actes accomplis de bonne foi; une semblable protection est accordée au Tribunal des professions, au syndic et au Conseil d’administration d’un ordre professionnel, mais le degré de protection dont bénéficient ces personnes varie selon la fonction qui est exercée.

2.    La notion de la mauvaise foi est flexible.

3.    Tel qu’établi par la Cour suprême dans l’arrêt Finney, la mauvaise foi ne correspond pas toujours à la faute intentionnelle et doit recevoir une portée plus large englobant l’incurie, l’imprudence ou l’insouciance grave.

4.    Une preuve d’intention de nuire ou de malice ne peut être exigée afin de démontrer la mauvaise foi et d’engager la responsabilité civile des membres d’un Comité de discipline.

5.    La mise en contexte est essentielle à l’analyse de l’état d’esprit des membres du Comité de discipline et constitue un passage obligé pour parvenir à une détermination quant à leur bonne ou mauvaise foi.

6.    Une cour d’appel ne peut mettre de côté, en l’absence d’une erreur manifeste et déterminante, les déterminations de fait du juge en première instance.

LES LEÇONS À RETENIR

1.     Les conseils de discipline et leurs membres ne peuvent être poursuivis en justice en l’absence d’une preuve de mauvaise foi, une immunité étant conférée par l’article 193 du Code des professions.

2.     La notion de la mauvaise foi ne correspond pas toujours à la faute intentionnelle.

3.     Le droit de la responsabilité civile du Québec semble aussi accepter l’insouciance ou l’incurie grave ou déréglée comme preuve de la mauvaise foi. Dubé Légal inc., avocats en droit disciplinaire à Montréal.